Lundi, taf à Montpellier. Mardi, taf à Toulouse. Mardi 18h, affronter les aléas de la rocade toulousaine vers Blagnac, sans être certain d'avoir un avion pour Paris ne me tentait pas - en outre cela m'obligeait à laisser ma voiture (de fonction, thin brag) à Toulouse, qui n'est pas la plaque tournante des mes activités chez Dell. Bref, je reprends l'autoroute vers Montpellier, avec l'intention de remonter sur Paris en train à partir de là-bas.
En passant près de Narbonne, me vient l'idée de m'arrêter à Gruissan, où je ne suis jamais allé. Je trouve le casino sans difficulté, il souffle un vent violent de terre. Dans le casino, je prends les renseignements : le CG ouvre les soirs où il y a tournoi, et ce soir il n'y a pas de tournoi. Je prends à tout hasard le programme du mois de juillet. Je quitte le casino, le vent me dissuade d'aller dîner les pieds dans le sable sous une paillotte, je reprends la route.
Me vient alors l'idée de rejoindre Barcelone, où je ne suis jamais allé. J'ai un peu de route, ça fera 22h30 sur place, parfait pour dîner en Espagne. C'est parti. Quelques travaux sur l'autopista en Espagne, mais finalement je tiens une bonne moyenne. J'arrive à Barcelone, mais je loupe une bretelle et au lieu de prendre la direction du port, je passe à l'intérieur des terres et sorti du periph', je dois traverser la ville dans le sens radial.
Les avenues de Barcelone sont gigantesques et l'architecture est superbe. Je m'adapte rapidement à la conduite Outrun des catalans - qui démarrent en anticipant le feu vert - tout en écarquillant les yeux autour de moi. La nuit est tombée mais il y a des piétons, des vélos, des gens partout. Je rejoins le port par le sud - une zone piétonne noire de monde, je remonte vers la c/ marina, mais je prends l'avenue trop haut et ce sens unique radial m'eloigne à nouveau de ma destination.
Qu'importe, la ville me séduit, alors je roule. Je remonte jusqu'à la Sagrada Familia que je ne connais que de nom, et je reste scotché devant cette architecture irréelle et magnifique - et éclairée de nuit. Je tourne plus d'une heure dans la ville avec plaisir. Le temps de retrouver mon chemin, je me gare dans un parking près du casino.
Il est minuit moins le quart quand je m'assois à la PLO 5-10 de la poker room - seul endroit parmi les dix douze tables où il y a de la place. Du no-limit holdem 1-2 2-4 3-6, je prends la liste d'attente pour la 2-4, et je cave 300. Il y a plusieurs raisons à ce choix : d'abord je veux observer, ensuite je ne trimballe pas ma bankroll live en déplacement professionnel, enfin je veux rester discret à la table - qu'on me voie plutôt comme un random que comme un mec qui cave très deep (qu'il soit pro ou flambeur). Bref.
La table joue large, mal, et les livraisons postflop semblent aller bon train - quand cinq joueurs sur dix à la table voient la river alors que chaque street a été pottée, c'est un signe, croyez-moi. Quelques joueurs jouent des mains sérieuses, mais ceux-là sont juste à ma droite, je saurai les éviter, et j'ai un regfish cagoulé juste à ma gauche, qui joue 95/25.
Après avoir passé six ou sept mains et pu observer le niveau catastrophique de certains joueurs, je défends de sb
à 30 dans un multi à 6 joueurs, mais la bb est active et porte les enchères à 130. Tous sauf un paient, et je choisis l'option loose de payer - ce serait mieux d'avoir plus de profondeur à miser si je connecte avec le flop. Celui-ci vient
. J'ouvre à 160 et tapis - finalement être plus deep aurait été source de problèmes. Deux joueurs paient, les autres passent, la turn apporte un
, papy potte et fait passer le dernier joueur. La river est un
, papy abat 974T naked (c'est à dire sans tirage Carreau, autant dire qu'il a payé avec une main faible (6 nut-outs sans flush redraw, démonstration de pédalage), j'ouvre 86 qui surprend tout le monde mais mon tirage Carreau enlève leurs soupçons - avec cette main, je ne suis ni un fish ni un joueur dangereux - main loose, tirage pas max... c'est parfait.
La table parle en espagnol, la plupart sont des locaux. Il y a deux russes ultradeep, l'un est une serrure, l'autre va flamber deep et recaver deep (mille par-ci, deux mille par-là), mais au final je vais les éviter et jouer avec l'animateur cagoulé assis à ma gauche.
Après être monté à 1100 après ce premier pot, je joue passif préflop, car les erreurs postflop de la table sont trop rentables pour complexifier le jeu et augmenter la variance en 3-bettant pf. Donc, je suis discret, je montre que je comprends très bien l'espagnol, mais je me contente de parler en anglais au croupier.
Je touche midset avec
sur
dans un pot multiway (6x20 pf). Après quelques checks, je checke au hijack et mon voisin de gauche potte 120, la table passe et c'est à moi. Peut-il avoir AAxx? Je pense que non, avec sa position, sa cagoule, et quelques jetons au milieu, il aurait probablement 3-bet pf. (Notez bien que mon analyse était correcte à propos de mon voisin de gauche, mais que si ça avait été mon voisin de droite, alors il a AAxx et je vais rapidement envoyer mes cartes à la défausse). Peut-il attaquer un tirage Coeur max? Possible, mais il semble en value et non "en projet" (nom espagnol proyecto, tirage). Bref, il "value" A2xx ou Axxx avec des montantes (tirage deux paires max) ou des babies (tirage quinte A2345). Je paie. Turn
. Je checke, il potte 360, je paie (il joue 200 derrière). Techniquement, j'aurais pu relancer, mais je ne le fais pas - disons que c'est pour donner une image passive. River brique absolue
, je checke et il value 200 son AQxx sans Coeurs, mais tout est pour papa. Encore une fois, je montre une main évidente préflop, et un jeu non max postflop, toujours bon pour l'image.
Quelques mains passées plus tard, mon adversaire de gauche a non seulement recavé short, mais il a gagné quelques coup et a remonté du tapis. Je limpe
:-P~ utg, mon nouvel ami relance 40, la table paie en nombre, je paie - comme je l'ai déjà expliqué, quand ça livre postflop... ben on joue postflop!). Flop
. Un joueur mise tapis (moins que le pot), je paie, mon voisin de gauche paie en position. Turn
. Je checke, il potte 1120 - il lui reste 15 derrière. Il peut donc avoir KKxx, 22xx, et K2xx. C'est là où le profil du joueur et l'utilisation de la lecture sont nécessaires. Je montre ma surprise devant sa mise, et je lui demande en espagnol "pourquoi autant?". Il me répond un blabla que je ne vous retranscris pas, dans lequel les mots-clés sont "poker de doses" - carré de Deux. Je réponds "voy a pensar", et je paie après dix secondes. La river n'est ni un K ni un 2, et mon full 5-2 a la pointure sur son full 2-K.
A une heure et quart du matin, je quitte la table avec 3500 de benef. Les casinos à l'étranger (Namur, San Remo, Venise...) me réussissent de façon exceptionnelle - un peu de jeu, pas max, et des livraisons. J'ai mangé, je reprends la route vers Montpellier et un train du matin. J'ai dormi quelques heures en route, ça m'a fait du bien.
Post scriptum :
- Le Roussillon est une région dangereuse tant le vent en rafale y est violent.
- La langue catalane, c'est nul - ce sont des raisons politiques autour de l'indépendance de l'autonomie qui la mettent en avant, mais côté linguistique, un patois occitan > la langue catalane.
- Dans ma prochaine vie, je partirai en Eramus* à Barcelone, qui m'est apparu en une nuit d'été comme un pays de cocagne tant pour les amateurs d'architecture, les épicuriens / ballas / jemelacouledouce de tous poils, et pour les jeunes gens qui ont envie de soleil et de jolies jeunes femmes dans une société cosmopolite. *façon Auberge Espagnole : une année d'études-glandouille à faire la fête et des folies de son corps.